Lettre F
Famille
La famille peut-ĂȘtre un facteur important dans la construction de son identitĂ©. Elle influence notre rapport Ă la sociĂ©tĂ©, nous donne une culture, parfois une religion, des traditions. On construit son identitĂ© par rapport Ă ces rĂ©fĂ©rences, quâon soit dâaccord avec elles, pas dâaccord du tout, ou parfois dâaccord.
Si une famille permet de passer des bons moments, dâĂȘtre soutenu·e, de se sentir aimé·e et dâaimer en retour, il arrive quâelle impose des choix qui ne sont pas forcĂ©ment les nĂŽtres. Que ça soit dans le domaine de lâamour, de la sexualitĂ©, des Ă©tudes, du travail⊠Nâoublie jamais que ces choix sont les tiens. Une fois que tu es majeur·e, tu as le droit de choisir la vie que tu souhaites mener comme tu lâentends, mĂȘme si ça peut sembler difficile.
Par ailleurs, la famille, pour exister, nâa pas forcĂ©ment Ă ĂȘtre composĂ©e dâun pĂšre, dâune mĂšre et dâenfants. Il peut y avoir des familles sans enfants, des familles avec deux pĂšres ou deux mĂšres, des familles monoparentales⊠Lâargument qui consiste Ă dire que les enfants ne sont bien Ă©levĂ©s que sâils ont une mĂšre et un pĂšre â pour des raisons dâĂ©quilibre et de reprĂ©sentation â ne tient pas : cela ne fait que trĂšs peu de temps que les pĂšres sâoccupent des enfants ! Pendant trĂšs longtemps, lâĂ©ducation a Ă©tĂ© confiĂ©e Ă dâautres personnes que les parents. Certains enfants sont Ă©levĂ©s par un seul des deux parents (dĂ©cĂšs, divorce, sĂ©parationâŠ), et ne sâen portent pas plus mal. Il y a aussi des sociĂ©tĂ©s oĂč les enfants sont confiĂ©s Ă des groupes de femmes, ou Ă des groupes dâhommes, dĂšs leur plus jeune Ăąge. « Un papa, une maman », ce nâest pas du tout la norme !
Pour bien Ă©lever un enfant, que faut-il finalement ? La rĂ©ponse Ă cette question dĂ©pend de chacun·e : mais des valeurs comme lâamour, la confiance, lâattention, la bienveillance, donnent gĂ©nĂ©ralement de bons rĂ©sultats. Pourquoi un couple dâhommes, de femmes, ou un parent seul ne pourrait pas en donner autant quâune femme et un homme ensemble ?
Fille facile
On traite de « fille facile » une fille ou une femme qui couche avec des hommes sans sentiments, une femme qui couche avec « beaucoup » de partenaires, une femme qui ne dit pas « non » quand elle se fait aborder ou une femme qui sâhabille de maniĂšre « vulgaire». Une rĂ©putation de fille facile arrive trĂšs rapidement et facilement. Les rĂ©putations se fondent sur des rumeurs. Les rumeurs sont rĂ©pĂ©tĂ©es et dĂ©formĂ©es. On ne sait jamais ce qui est vrai ou non, Ă moins dâavoir assistĂ© Ă la scĂšne et bien interprĂ©tĂ© ce que lâon a vu.
Quand on dĂ©nonce le comportement dâune fille dite « facile », on juge ce quâelle fait et avec qui elle le fait. On peut se demander qui ça dĂ©range ce que les gens font chez eux, sans faire de mal Ă personne. Une fille qui couche avec beaucoup de personnes gĂȘne pour plusieurs raisons : on se dit quâelle « ne se respecte pas », que « ce nâest pas convenable pour une fille », etc. Mais si ça lui va, si câest en accord avec ce dont elle a envie, oĂč est le problĂšme ? Une fille qui souffre dâune rĂ©putation de « fille facile » souffre parce que les gens lâont jugĂ©e, pas Ă cause de ce quâelle a fait. Qui est ce qui fait quelque chose de blessant ? Elle, ou bien les personnes qui la jugent ? Voir aussi: slutshaming.
Fragile
« Fragile » est souvent utilisĂ© pour dire dâun garçon quâil nâest pas courageux, quâil ne se dĂ©fend pas, qui pleure pour « rien ». Un garçon fragile, câest un garçon qui nâest pas viril. La pression de la sociĂ©tĂ© est forte sur les hommes. On attend dâeux quâils soient forts, courageux, quâils ne montrent pas leurs Ă©motions⊠On entend partout que câest la condition pour ĂȘtre viril, pour ĂȘtre un « vrai mec ». Ces comportements que lâon demande aux garçons sont impossibles Ă tenir. Il y a forcĂ©ment des moments oĂč on nâa pas la force dâĂȘtre courageux, oĂč on a envie de pleurer. Et câest normal ! Pleurer permet dâexprimer ses Ă©motions : la colĂšre, la rage, la joie, la peur, la dĂ©tresse⊠Se retenir dâexprimer ses Ă©motions, câest prendre le risque dâĂȘtre dĂ©passĂ© par elles. Câest aussi prendre le risque dâĂȘtre violent, envers soi-mĂȘme ou envers les autres, pour essayer de faire face aux Ă©motions contenues. La virilitĂ© est trĂšs valorisĂ©e dans la sociĂ©tĂ©, par rapport Ă la fĂ©minitĂ©. Les qualitĂ©s que lâon attend dans les domaines valorisants et stimulants sont toutes associĂ©es Ă la virilitĂ© : autoritĂ©, force, maĂźtrise de soi, etc. Elles sont mises en parallĂšle avec les qualitĂ©s dites « fĂ©minines » (douceur, comprĂ©hension, Ă©coute, tolĂ©rance, retenue, pudeurâŠ). On valorise donc systĂ©matiquement ce qui est masculin par rapport Ă ce qui est fĂ©minin. Câest de lĂ que viennent les mouvements fĂ©ministes. Ces mouvements ont pour but de rĂ©tablir lâĂ©galitĂ© entre les qualitĂ©s valorisĂ©es ou dĂ©valorisĂ©es par la sociĂ©tĂ©, pour que ces valeurs ne soient plus hiĂ©rarchisĂ©es, et quâelles ne soient plus attribuĂ©es soit aux hommes soit aux femmes, mais que chacun·e soit libre dâĂȘtre comme il·elle le souhaite.
FriendZone
La friendzone, câest quand on veut avoir une relation sexuelle ou amoureuse avec quelquâun qui prĂ©fĂšre rester ami·e. Parfois, câest quand les sentiments dâune des deux personnes Ă©volue en amour, et que lâautre nâest pas rĂ©cepti·f·ve ; parfois, lâune des deux Ă©tait attiré·e dĂšs le dĂ©part et a fait semblant dâĂȘtre ami·e en espĂ©rant plus.
Ăa peut arriver Ă tout le monde. Mais concrĂštement, on remarque que beaucoup plus de garçons se plaignent dâavoir Ă©tĂ© friendzonĂ©s. On entend des phrases du genre : « Franchement je ne comprends pas pourquoi elle veut pas coucher avec moi, jâai Ă©tĂ© trop cool avec elle ». Comme si le fait dâĂȘtre sympa donnait des droits sur les autres ; comme si les gens devaient du sexe sous prĂ©texte quâon a Ă©tĂ© gentil·le avec elles. Ătre sympa et attentionné·e parce quâon attend quelque chose derriĂšre, ce nâest pas de la gentillesse. Câest tout le contraire. La gentillesse nâest pas non plus un Ă©change : on nâa pas Ă attendre quelque chose en retour. Ni de la gentillesse, ni une histoire dâamour, ni de lâattention, ni du sexe ! Si tu veux lire un tĂ©moignage, tu peux aller voir lâ article dâoĂč vient la superbe illustration du pays de la Friendzonie!
Frigide
Dans le langage commun, ĂȘtre frigide signifie connaĂźtre une absence ou une diminution du dĂ©sir et du plaisir dans lâensemble de la vie sexuelle pour diverses raisons – petit rappel, ne pas confondre avec lâasexualitĂ©
On entend souvent dire que les femmes sont frigides et pourtant câest rare. Dans certains cas, il est vrai quâune inhibition du plaisir et du dĂ©sir peut dĂ©ranger et amener Ă ressentir le besoin dâĂȘtre aidĂ©e par des spĂ©cialistes de la santĂ©. Mais cela arrive aussi bien aux femmes quâaux hommes. En fait, la plupart du temps, on utilise ce mot Ă mauvais escient. On lâutilise quand les femmes nâont pas dâorgasmes et pourtant on peut tout Ă fait prendre du plaisir sans avoir dâorgasme. Et si il est vrai que les femmes ont plus de difficultĂ©s que les hommes Ă avoir des relations sexuelles quâelles jugent satisfaisantes, ce nâest pas du tout parce quâelles sont toutes frigides, mais Ă cause de lâabsence dâinformations sur le plaisir fĂ©minin, et aussi, Ă cause de raisons culturelles et sociales liĂ©es aux inĂ©galitĂ©s femmes-hommes.
FĂ©minisme
Le fĂ©minisme, câest un mouvement intellectuel, politique et militant qui estime que les femmes et les hommes sont Ă©gaux. Ses militant·e·s travaillent Ă promouvoir lâĂ©galitĂ© des genres dans la sociĂ©tĂ©.
Le fĂ©minisme est souvent mal perçu : on dit que les fĂ©ministes sont « agressives », « hystĂ©riques » et quâelles veulent « dominer les hommes ». En rĂ©alitĂ©, les fĂ©ministes souhaitent que tous les genres soient Ă©gaux, justement pas quâun genre domine lâautre. Les gens pensent cela parce quâĂȘtre fĂ©ministe suppose un constat de dĂ©part : le fait que, dans la sociĂ©tĂ©, on sĂ©pare lâhumanitĂ© en deux moitiĂ©s, les femmes dâun cĂŽtĂ© et les hommes de lâautre. Cette sĂ©paration, binaire, justifie et entretient lâidĂ©e que les femmes et les hommes sont deux catĂ©gories distinctes.
Câest difficile Ă comprendre, parce que la loi â depuis la Constitution de 1946 â garantit aux femmes les mĂȘmes droits que les hommes. Cependant, on voit bien que dans les faits, ce nâest toujours pas le cas : les femmes sont toujours payĂ©es, Ă travail et Ă compĂ©tences Ă©gales, 27% de moins que les hommes. Elles occupent les emplois les plus prĂ©caires, et ce sont elles qui rĂ©alisent toujours 80% des tĂąches mĂ©nagĂšres et domestiques, par exemple. Les fĂ©ministes militent pour que cela change et que tout le monde soit traitĂ© Ă Ă©galitĂ©.
On peut Ă©galement dire quâil nâexiste pas « un fĂ©minisme », mais « des fĂ©minismes » : comme dans tout courant politique, les idĂ©es sont trĂšs diffĂ©rentes dâun mouvement Ă lâautre sur de nombreux sujets. Câest grĂące aux mouvements fĂ©ministes que les femmes ont obtenu le droit de vote, le droit de travailler et dâouvrir un compte en banque sans lâautorisation de leur mari, ainsi que le droit de disposer librement de leur corps (lois sur la contraception de 1967 et sur lâavortement, en 1975). Ces droits ont Ă©tĂ© acquis trĂšs rĂ©cemment, du milieu Ă la fin du XXĂšme siĂšcle. Ils sont dâailleurs remis en question rĂ©guliĂšrement en Europe. Rien nâest encore acquis.
On entend parfois dire que le fĂ©minisme ne sâoccupe pas des hommes, quâeux aussi, ils souffrent, car les normes qui leurs sont imposĂ©es (ĂȘtre musclĂ©, fort, ne pas montrer ses sentiments, devoir faire le premier pas, etc.), sont difficiles Ă tenir. Ces rĂŽles, ce sont ceux quâon attend des hommes dans une sociĂ©tĂ© patriarcale. Et câest justement le patriarcat que combattent les fĂ©ministes ! Pour que chacun.e puisse faire ce quâil·elle veut, sans ĂȘtre jugé·e par la sociĂ©tĂ©.