“Retirer le pantalon pour les mecs, le soutien-gorge pour les filles (pas de demande explicite d’enlever le t-shirt mais clairement, si elles le faisaient, c’était du bonus), nous frotter les uns aux autres, enfiler une capote sur un concombre avec la bouche et être mises en compétition selon notre capacité à le faire…
D’autres missions consistaient à embrasser des poissons morts avariés de plusieurs jours, boire des shots emplis d’asticots, mimer des actes sexuels. En résumé : mettre son amour-propre de côté.”
Tifaine, 22 ans
Dans certaines filières, où les études sont particulièrement difficiles et exigeantes, ou qui mettent au contact de situations lourdes (maladie, mort…), souvent, la fête est utilisée comme LE moyen de lâcher prise. Cela passe souvent par le jeu, le challenge, le défi… et il arrive que l’amusement glisse vers des comportements dégradants, humiliants ou dangereux.
Le désir de s’intégrer, de faire partie du groupe, de ne pas passer pour la ou le relou·e de service… tout ça fait qu’il est difficile de s’opposer à ces pratiques quand elles sont demandées – ou plutôt exigées par les autres.
« Pour avoir refusé d’enlever son haut, une camarade est restée longtemps enfouie, en plein cagnard, sous une pile de fringues ayant entre autres reçu de la pâtée pour chiens, de l’alcool, des poils pubiens, du vinaigre, des sauces… »
De même, quand on sent qu’on peine à s’intégrer pour d’autres raisons, par exemple, parce qu’on a moins d’argent, ou parce que notre origine sociale, culturelle ou religieuse ne correspond pas à celle qui domine au sein du groupe, ou encore si on vit avec un handicap, on peut se sentir encore plus sous pression lors de ces moments d’intégration.
Mais on ne fait que s’amuser !
Si certain·es disent bien vivre ces moments, de nombreux comportements qui existent dans ces soirées, pourtant courants et banalisés, sont en réalité des actes de violence.
Quelques outils pour faire le point :
- Les insultes, propositions obscènes, commentaires non-sollicités, grossiers ou déplacés sur l’apparence, les vêtements ou le corps, même si c’est “juste pour rire” constituent des violences verbales ;
- Le chantage, les pressions, les incitations devant tout le monde à boire ou à fumer par exemple alors qu’on a dit non, la dévalorisation de ses opinions ou de son importance (en raison du genre, du handicap, de l’orientation sexuelle, de l’origine ou d’autres critères), la non prise en compte du refus, la réduction d’une personne à une simple apparence physique ou à des parties du corps sans considération de sa personnalité ou de ses émotions constituent des violences psychologiques ;
- Les bousculades, les coups, les comportements dangereux (pousser dans l’eau, forcer à conduire en état d’ébriété,…), les comportements extrêmes (boire ou manger des choses sales ou inhabituelles, faire beaucoup trop de sport, empêcher de dormir…), constituent des violences physiques ;
Les mains aux fesses, les contacts avec la poitrine, les baisers forcés, la pression pour enlever ses vêtements, les relations sexuelles forcées, l’obligation à regarder ou mimer des contenus pornographiques constituent des violences sexuelles.
Ok, maintenant je fais quoi ?
Parfois, ce n’est pas évident de faire le tri dans ce qu’on ressent. Il se peut qu’il y ait eu des moments cool et des gens sympas alors même qu’on était avant ou après impliqué dans des situations malaisantes sans savoir quoi faire. On peut alors se sentir un peu perdu·e et avoir du mal à savoir comment se positionner.
Il est aussi tout à fait normal d’être bouleversé·e, choqué·e ou en colère parce qu’on a subi un bizutage ou des actes pour lesquels on n’était pas d’accord. C’est aussi normal de se sentir impuissant·e et un peu honteux·se parce que l’on a laissé faire une situation qui ne nous semblait pas acceptable. La pression de groupe est souvent forte, c’est pourquoi ce n’est pas facile de le dire, ni d’être entendu·e.
Parfois, on a aussi un peu honte parce qu’on a bu et que l’on se dit qu’on aurait pas dû, mais une chose est claire : personne n’a le droit d’imposer aux autres des actes qui sont dégradants ou humiliants. L’alcool, la pression des études, les traditions, sont des prétextes. Ce ne sont pas des excuses.
Quand cela nous arrive, on peut tout à fait en parler à ses ami·es, à sa famille, ou à quelqu’un en qui l’on a confiance, dans un syndicat étudiant par exemple. Et surtout, il ne faut jamais hésiter à se référer à des professionnel·les pour ces questions. Écouter ses ami·es est important et très précieux pour elles et eux ; il est aussi important de garder en tête qu’il y a des problèmes qui demandent de la distance et de l’expertise pour les régler.
Notre tchat, disponible sur l’onglet “Je discute avec une professionnelle” du site, permet de se confier en toute discrétion et sans avoir à dire son nom. Notre équipe a l’habitude d’écouter de nombreuses situations différentes, et est formée à aider les personnes qui se confient à faire le point et à proposer des solutions personnalisées.
Pour se confier plutôt par téléphone, ou pour signaler quelque chose qui s’est passé au sein d’un établissement, il est aussi possible de nous appeler au 0800 737 800. Il s’agit d’une ligne d’écoute que nous tenons et qui nous permet de faire remonter des informations aux autorités étudiantes compétentes, de manière anonyme et gratuite.
Et sinon, on explique la technique des 5D qui apprend à réagir au harcèlement dans l’article 👉 Comment réagir quand je vois une situation malaisante en soirée ?